La sécurité alimentaire est clairement un enjeu mondial : d’ici à 2050, notre planète devra nourrir 9,7 milliards d’individus, et l’on s’attend à ce que la demande mondiale de denrées alimentaires augmente de 60 %. Dans le cadre du deuxième Objectif de développement durable (ODD) à l’horizon 2030, les Nations Unies se sont fixé pour but d’éliminer la faim, d’assurer la sécurité alimentaire et de promouvoir une agriculture durable.
Fervent défenseur des 17 ODD adoptés par les Nations Unies en septembre 2015, le Nigéria est l’un des premiers pays à sʼengager dans cette voie, et divers plans et politiques visant à atteindre ces objectifs sont désormais mis en œuvre. Selon le Fonds pour la réalisation des objectifs de développement durable (SDGF) – un mécanisme des Nations Unies permettant de financer des initiatives de développement durable –, dans ce pays dépendant fortement de l’agriculture, qui représente 70 % des emplois, la malnutrition prévaut encore dans de nombreuses régions. Aujourd’hui, pour résoudre la question de l’insécurité alimentaire chronique dans certaines contrées, le Nigéria se tourne de nouveau vers son agriculture.
L’importance de la sécurité alimentaire
Pourquoi une telle urgence ? La raison est évidente : tout le monde a besoin de ressources alimentaires. Notre organisme ne peut en effet survivre sans une nutrition adaptée. Pourtant, plusieurs études ont révélé que, sur une population mondiale forte de 7,6 milliards d’individus, une personne sur dix souffre de la faim. Or face à la hausse démographique mondiale, la situation pourrait encore s’aggraver.
La sécurité alimentaire repose sur la disponibilité des ressources alimentaires et l’accessibilité aux denrées disponibles. Avant la découverte de pétrole au Nigéria, qui a mis un terme à l’allocation de fonds au secteur agricole, la question de l’insécurité alimentaire ne se posait pas ; le pays était en mesure de nourrir sa population tout en exportant ses excédents. Aujourd’hui, malgré un potentiel agricole considérable, le Nigéria est désormais un importateur net de denrées alimentaires.
Autrefois principale source de revenus et de recettes en devises pour l’État nigérian, le secteur agricole a subi des décennies de sous-investissement, de désintérêt politique et d’occasions manquées du fait de la mauvaise qualité des matériels de plantation, d’un recours limité aux engrais et des faiblesses du système de vulgarisation agricole.
Une approche holistique
Mais l’insécurité alimentaire au Nigéria n’est pas uniquement liée à des problèmes de sous-production (le pays produit respectivement 8,41 %, 1,09 % et 2,85 % de racines et de tubercules, de céréales et de légumes), même s’il est urgent d’intensifier la production. Selon un rapport de la Banque centrale du Nigéria (2001), le taux actuel d’accroissement de la production agroalimentaire de 2,5 % par an ne fait pas le poids face à une croissance démographique annuelle de 2,8 %.
La concurrence croissante s’exerçant sur l’accès à la nourriture exige désormais des solutions durables, mais quelles mesures doit-on mettre en œuvre pour véritablement permettre au secteur agricole d’être un moteur de croissance transformatrice ? Bien entendu, accroître la production ne constitue pas une solution miracle pour résoudre le problème de l’insécurité alimentaire au Nigéria ; une approche globale est en revanche de mise.
L’autosuffisance n’est possible que si les rendements des cultures sont couverts par les techniques post-récolte, qui déterminent fortement la qualité finale du produit. Il est pour cela nécessaire de protéger les cultures de la détérioration et du gaspillage en investissant massivement dans les techniques de stockage, de stimuler la production et de prévenir la constitution de stocks de denrées alimentaires par les fournisseurs agroalimentaires ou par des acheteurs locaux. Parallèlement, l’adoption d’une approche holistique en matière de recherche agricole, s’appuyant sur diverses parties prenantes de la chaîne de valeur agricole, du secteur public comme du secteur privé, est indispensable.
Suffisamment sûrs pour être mangés
Avec une économie en croissance rapide, une classe moyenne en plein essor et des chaînes d’approvisionnement complexes, le Nigéria doit également relever un nombre grandissant de défis liés à la sécurité des denrées alimentaires. Malgré tous les efforts de l’industrie, les maladies d’origine alimentaire et les rappels de produits alimentaires sont très fréquents dans les restaurants et les chaînes de restauration dans l’ensemble du pays. Selon lʼantenne nigériane des Centres pour le contrôle et prévention des maladies, dans plus de la moitié des cas, les foyers de toxi-infection alimentaire du pays sont associés à une mauvaise manipulation des aliments dans les restaurants, lieux de banquets, écoles et autres institutions.
La sécurité des denrées alimentaires implique des efforts et le respect des procédures mises en place pour garantir l’innocuité des denrées alimentaires, de la ferme à la table. Ces efforts incluent notamment les mesures de sécurité et d’éthique lors de la manipulation, de la préparation et du stockage des denrées. L’environnement et l’hygiène personnelle, la maîtrise des nuisibles, l’élimination des déchets, mais aussi les programmes de nettoyage visant à réduire au minimum le risque de maladies d’origine alimentaire, et ce tout au long de la chaîne, sont également des enjeux majeurs.
Au Nigéria et dans le monde entier, les gouvernements continuent d’adopter des lois et des réglementations pour prévenir toute pratique contraire à l’éthique et susceptible de favoriser la prolifération de maladies d’origine alimentaire dues à la consommation de produits dangereux. Il est donc indispensable de disposer de normes permettant d’identifier, de prévenir, de maîtriser et de surveiller les parasites microbiens et agents pathogènes d’origine alimentaire pour parvenir à un niveau de qualité acceptable au sein de l’industrie agroalimentaire et de sa chaîne de valeur.
Relever les défis
Les normes ISO sont incontestablement un outil essentiel pour relever les défis alimentaires actuels. Elles permettent en effet des pratiques sûres tout au long des chaînes mondiales d’approvisionnement en denrées alimentaires, des méthodes agricoles saines aux spécifications de disposition des produits finaux. Cette tendance mondiale a incité la Standards Organization of Nigeria (SON), membre de l’ISO pour le Nigéria, à définir, en collaboration avec ses parties prenantes, des limites et des exigences axées sur la préservation de la qualité alimentaire et les meilleures pratiques mondiales.
Sur les 50 000 normes élaborées par la SON, près de 5 000 traitent de l’alimentation. Nous réexaminons les normes alimentaires existantes, en élaborons de nouvelles et évaluons les points de désaccord autour des nouveaux besoins du marché. Mais la pertinence de la réglementation repose sur les ressources disponibles pour procéder à des investigations et veiller à son application ; les normes industrielles nigérianes permettent donc une traçabilité grâce à l’étiquetage, des systèmes de sécurité sanitaire proactifs et une conformité aux exigences réglementaires.
Une action coordonnée
Qu’il s’agisse de sécurité des denrées alimentaires ou de nutrition, des efforts concertés sont nécessaires pour provoquer le changement, des multinationales aux individus chargés de transporter, de stocker et de vendre des denrées alimentaires. Prenons l’exemple de la sécurité sanitaire des aliments. Bon nombre d’efforts sont réalisés pour relever les défis liés à la sécurité des denrées alimentaires, tels que les agents pathogènes d’origine alimentaire, les organismes de détérioration et leurs toxines. C’est pourquoi de nombreuses entreprises agroalimentaires nigérianes utilisent désormais ISO 22000 pour les systèmes de management de la sécurité des denrées alimentaires et adoptent l’analyse des dangers et des points critiques pour leur maîtrise (HACCP), un système de surveillance de la production de denrées visant à prévenir toute contamination le plus tôt possible. De plus, les fabricants et les experts de l’industrie agroalimentaire continuent de combattre certaines pratiques excessives, comme l’utilisation de matières premières de piètre qualité ou d’additifs non déclarés, ou encore la fraude alimentaire.
Pour obtenir des denrées de bonne qualité pouvant être consommées en toute sécurité, il est indispensable de disposer d’un système de sécurité et de qualité des denrées alimentaires unifié, en particulier dans des pays dotés de systèmes de contrôle alimentaire faibles et fragmentés. Mais il reste encore beaucoup à faire. Il faut notamment traiter la question des virus émergents et des organismes résistants aux agents antimicrobiens, élaborer des méthodes améliorées pour l’identification des organismes génétiquement modifiés, tout en optimisant l’efficacité de la conformité tout au long de la chaîne alimentaire.
Si de nombreux obstacles restent à surmonter, le secteur alimentaire offre cependant de belles opportunités au Nigéria. En dépit des revers, le secteur agricole du pays est toujours considéré comme la branche la plus forte et la plus développée de son économie. Les différents climats du Nigéria, aussi bien tropical que subtropical, facilitent la croissance de pratiquement toutes les cultures de la région. Et grâce aux normes ISO et à la collaboration de la SON avec les agences nationales, les produits nigérians sont prêts à affronter la concurrence sur les marchés locaux et internationaux.